L’octant de Louis-Joseph de La Vérendrye

La cartographie de La Vérendrye est intimement liée à l’eau. Succincte et pragmatique, elle se limite à signaler les rapides, les portages, les crêtes et le sens des cours d’eau. Son but n’est pas de représenter la surface d’une région, mais de fournir un code de passage, un schéma d’étapes indiquant, par exemple, que le Lac des Bois représente « 4 jours de marche ».

Le deuxième type d’information que contiennent ces cartes ce sont les peuples qui habitent les terres, car c’est avec eux qu’il faut s’entendre : La Vérendrye est un homme au contact facile et ses enfants lui secondent rapidement en maîtrisant plusieurs langues autochtones. Quand il est encore dans les balbutiements de son projet, en 1727, le chef Ochaga lui fait ce dessin ‘prêt à servir’ pour l’accès à l’ouest. Il sera repris et commenté quelques années plus tard par l’atelier Delisle de Paris à l’aide des mémoires du découvreur :

Dessin du chef Ochaga, fait pour La Vérendrye en 1727, repris ici par l’atelier Delisle de Paris (détail), Cours des rivières, et fleuves, courant à l’ouest du nord du Lac Supérieur…, BNF.

Mise à part l’utilisation parcimonieuse de la boussole, les autres instruments d’orientation rentrent en scène seulement à partir de 1735, avec l’arrivée du cadet La Vérendrye, Louis-Joseph, mieux connu comme ‘le Chevalier’. Pourquoi avec lui ?

— Je t’assure d’une chose — avait confié dans sa jeunesse La Vérendrye père à un ami, en découvrant sur une carte la ‘mer de l’Ouest’ — : quand j’aurai un enfant, je vais l’envoyer étudier la géographie.
— Ça ne sera pas mauvais si tu as l’idée d’arriver là — lui avait répondu l’ami.

Alors, pendant que ses frères accompagnaient leur père déjà à la première sortie de 1731, l’éveillé Louis-Joseph est resté quelques années à étudier les mathématiques et la géographie à Québec, d’où il est revenu avec un calepin plein d’équations et un étrange objet qu’il appelait astrolabe, mais qui était un octant passablement moderne, l’ancêtre du sextant.

— À quoi lui servait-il au juste ?
— À mesurer la hauteur du soleil de midi sur l’horizon d’un lac.
— Et puis ? Qu’est-ce que ça donne ?
— Là, c’est le calepin qui entrait en fonction : en plaçant la date d’observation entre le solstice le plus proche et l’équinoxe correspondant, une simple formule permet de passer de la hauteur méridienne du soleil sur l’horizon à la hauteur de l’observateur sur l’équateur, c’est-à-dire la latitude.
— Hum ! Et la longitude ?
— Ça non. Il était encore trop tôt dans l’histoire. Il manquait le chronomètre…

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